Mis à jour le 2 septembre 2022
Si la plupart des enquêtes se contentent d’une langue unique, certains contextes obligent à prévoir plus d’une langue pour le questionnaire. De la classique enquête bilingue français/anglais au sondage mondial proposant plus de 10 langues, la difficulté du projet augmentera rapidement avec le nombre de langues et la complexité du questionnaire. A tel point que cela peut très vite devenir ingérable sans une organisation bien cadrée ! Dans cet article, je vous partage tous mes conseils pour réussir votre enquête multilingue fingers in the nose !
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Mes 10 conseils pour votre enquête multilingue
1. Soigner le questionnaire
OK, c’est évident, mais une enquête multilingue est avant tout une enquête ! Il vous faut donc respecter les bonnes pratiques en vigueur, et notamment :
- Questions non obligatoires
- Echelle de notation adaptée
- Pas de question oui/non
- Evaluer un point à la fois
- Une bonne expérience utilisateur
- Et toutes les bonnes pratiques listées sur ce site !
Certaines bonnes pratiques prennent cependant une importance particulière dans les enquêtes multilingues :
- Ne jamais préjuger de la situation des participants. Mieux vaut en effet ne pas les forcer à rentrer dans des cases qui ne les concernent pas ! (et plus vous avez de nationalités présentes, moins vous pourrez connaître ces « cases »)
- S’en tenir à des phrases courtes et précises, beaucoup plus faciles à comprendre et à traduire. Ce conseil s’applique partout dans votre enquête ! Les questions, les options proposées, les mots d’introduction et de conclusion, les e-mails… Tout doit être court et précis !
- Rester aussi neutre que possible. Vous ne savez pas ce qui peut choquer ou non d’autres cultures, alors limitez les risques !
2. Choisir soigneusement l’outil d’enquête en ligne
Déjà, ne vous précipitez pas sur votre outil d’enquête préféré, ou sur le premier outil gratuit que vous trouverez. Pour une enquête multilingue, la sélection de l’outil est une phase du projet à part entière ! Voilà ce que vous devrez chercher dans votre futur outil :
- Des fonctionnalités adaptées à vos besoins. Au-delà des fonctionnalités multilingues, l’outil doit évidemment vous permettre de mener votre enquête dans les meilleures conditions ! Gardez cependant à l’esprit que l’outil de vos rêves, qui répond à toutes vos conditions, n’existe probablement pas. Sachez prioriser vos besoins !
- Une fonction multilingue. Il faut bien distinguer la possibilité de créer votre enquête dans la langue de votre choix, et la fonctionnalité multilingue proposant plusieurs langues pour un même questionnaire (avec une langue principale et une ou plusieurs versions traduites). Ne faites pas un questionnaire par langue, cela deviendrait vite ingérable !
- Le support de vos langues. Assurez-vous que la plateforme supporte bien les langues que vous comptez utiliser… Y compris les langues un peu plus « exotiques » d’un point de vue occidental (alphabets non latins, langues s’écrivant de droite à gauche…).
- L’import/export de la traduction. Si votre enquête compte plus de 2 langues, la possibilité d’importer et exporter la traduction depuis la plateforme est indispensable ! Cela se fera le plus souvent au format csv ou Excel. La gestion de la traduction depuis la plateforme peut sinon se transformer en usine à gaz…
3. Penser le choix de la langue pour les participants
Une enquête multilingue, c’est un même questionnaire disponible en plusieurs langues. Mais évidemment, chaque répondant ne verra qu’une seule de ces langues ! Dans quelle langue chaque participant répondra-t-il ? La sienne de préférence, bien sûr… Mais comment s’assurer que ce soit bien le cas ? Il existe plusieurs manières de déterminer la langue de réponse pour un participant :
- Envoyer dans l’invitation un lien le redirigeant vers sa langue. Cela implique de savoir avec certitude sa langue préférée, ce qui n’est pas toujours évident (cf. point 7).
- Se baser sur la langue de son navigateur web, avec une langue par défaut (souvent l’anglais) si sa langue n’est pas supportée. Entre les personnes n’ayant pas configuré leur navigateur et celles qui seront redirigées vers une langue par défaut qu’elles ne comprennent pas, cette solution n’est pas vraiment fiable.
- Le laisser choisir parmi la liste des langues. Le meilleur moyen pour que le participant réponde dans la langue dans laquelle il est le plus à l’aise… c’est de le laisser choisir ! En affichant en première page les langues disponibles, il pourra facilement décider dans quelle langue il préfère répondre.
Ce mode de choix de langue peut également être un critère supplémentaire dans le choix de votre outil ! A noter qu’il est également possible de les combiner, en “suggérant” une langue avec la méthode 1 ou 2, mais en laissant le participant en changer s’il le souhaite.
4. Choisir votre équipe de traduction
Qui dit enquête multilingue dit traduction ! Il faudra ainsi traduire le questionnaire depuis une langue de départ (souvent le français ou l’anglais) vers une ou plusieurs langues cibles. Mais à qui devez-vous confier cette traduction ?
Traitons d’abord un cas particulier : celui d’une enquête bilingue (souvent français-anglais, mais d’autres cas de figure peuvent exister). Dans ce cas, il peut être très tentant de traduire soi-même l’enquête. Si ce n’est pas en soi impossible, cela nécessite d’être parfaitement bilingue (parler “couramment” anglais ne suffit pas). Si vous avez un doute sur le sujet, ne prenez pas le risque ! Ou faites à minima relire votre questionnaire par une personne bilingue ou native.
Quand on n’envisage pas de traduire soi-même le questionnaire, vers qui doit-on se tourner ? Il existe deux possibilités de traduction :
- En interne : en confiant la traduction aux personnes de votre entreprise (ou de votre client) basées dans les pays cibles. Si vous souhaitez traduire le questionnaire en allemand, vous pouvez ainsi confier la traduction aux équipes allemandes concernées par le projet.
- En externe : en passant par des traducteurs ou agences de traduction. Vous pouvez passer par un traducteur en direct pour la traduction/correction d’une seule langue, mais préférez passer par une agence multilingue pour traduire vers plusieurs langues.
Interne ou externe, que choisir ? Dans la majorité des cas, je vous recommande de faire traduire l’enquête en interne si possible. Pourquoi ? Car votre enquête contient probablement des noms d’entreprises, de marques, de produits, du jargon et des codes internes… Tous ces éléments seront maîtrisés et parfaitement traduits par des personnes internes, qui les manipulent au quotidien. Par des traducteurs… rien n’est moins sûr !
Donc, à moins d’avoir une enquête sur un sujet extrêmement générique, mieux vaut donner la priorité à une traduction interne.
5. Finir tous les contenus avant de lancer la traduction
Vous avez sélectionné votre équipe de traduction ? Parfait ! Mais avant de leur envoyer votre questionnaire, vérifiez bien d’avoir TOUS les textes à traduire ! Sinon, vous vous exposez à des allers-retours sans fin qui épuiseront tout le monde…
En particulier, votre fichier de traduction doit contenir :
- Le questionnaire finalisé à 100%, avec les questions et toutes les options de réponse proposées
- Les mots d’introduction et de conclusion du questionnaire. C’est-à-dire les textes qui seront placés en début et fin de questionnaire, directement sur la plateforme d’enquête en ligne.
- Les e-mails d’invitation et de relance
- L’interface de la plateforme. Ce n’est pas systématique, mais certaines plateformes auront besoin que vous traduisiez également leur interface. Il faudra par exemple traduire les boutons “suivant”, “démarrer”, “enregistrer”, le message “cette question est obligatoire”, etc.
Il y a peu de chances que vous arriviez à supprimer totalement les allers-retours post-traduction. Mais en anticipant au maximum, vous pourrez les réduire considérablement !
6. Faire relire la traduction et prévoir des allers-retours
Une enquête multilingue, c’est souvent des centaines de lignes à traduire. Il y aura donc forcément des erreurs ou des maladresses de traduction dans le lot ! Sans compter bien sûr la possibilité que la configuration de la traduction soit elle-même source d’erreurs (deux champs échangés, une traduction non importée, etc.).
Vous aurez donc besoin de faire relire la version traduite du questionnaire une fois qu’elle a été mise en ligne sur votre plateforme d’enquête. Ici, vous n’avez pas trop le choix : c’est en interne qu’il faudra effectuer cette relecture, afin de vérifier que tout est conforme à la “réalité” de l’entreprise dans cette langue.
Ne prévoyez donc pas un lancement le lendemain de la réception de la traduction ! Vous allez devoir laisser du temps aux correcteurs, et pour les différents allers-retours qui seront indispensables afin d’améliorer la traduction.
7. Lister les contacts et leurs préférences de communication
Dans la plupart des cas, vous allez envoyer votre enquête par e-mail à une liste de participants préétablie. Se pose alors une question : en quelle langue dois-je envoyer l’e-mail à chaque participant ?
Pour une enquête bilingue, il existe toujours une solution de facilité : envoyer un e-mail bilingue.
Pour les enquêtes multilingues (à plus de 2 langues), il faudra choisir une langue pour chaque participant (avec éventuellement une deuxième partie de mail en anglais, pour plus de sécurité). Cette question de la langue doit donc être intégrée dès la phase de collection des informations de contact sur les participants. L’idéal est évidemment d’avoir une langue préférée renseignée. Sinon, vous pouvez utiliser certaines informations pour essayer de déduire la langue, mais ayez conscience de leurs limites :
- Le pays : énormément de pays ont plusieurs langues dont aucune n’est parlée par toute la population. Sans compter, bien sûr, les expatriés dans un pays qui peuvent ne pas parler la langue locale.
- La ville : un peu plus précise que le pays, elle nécessite cependant beaucoup plus de travail (puisqu’il y aura beaucoup plus de villes à catégoriser que de pays).
- Le nom : il est assez hasardeux (et très chronophage) d’essayer de deviner la langue parlée par une personne à partir de son nom.
En bref : tâchez si possible de récupérer la langue préférée en même temps que les informations de contact. Si cette information n’existe pas, préférez charger les équipes locales de renseigner cette information que de le faire vous-même. Elles seront en général beaucoup plus à même de le faire de manière fine et pertinente ! Vous savez faire la différence entre chinois traditionnel et simplifié ? Comment différencier les ukrainiens qui parlent russe de ceux qui parlent ukrainien ? Ou comment déterminer la langue parlée par une personne en Belgique, en Suisse ou au Liban ? Moi non plus, mais il y a des chances pour que les équipes sur place en aient une bonne idée !
8. Penser et planifier en termes de process
Du début à la fin du projet, pensez en termes de process, créez des standards. Demandez-vous : si je dois refaire cette action une deuxième fois, comment je fais ? Parce qu’il y a des chances que vous ayez à refaire chaque action plus d’une fois ! Pour éviter le temps et les risques d’erreur que constituent les copier-coller individuels, voici quelques astuces pour organiser votre approche :
- Donnez un modèle standard à utiliser à chaque fois que vous demandez quelque chose à quelqu’un. Qu’il s’agisse du tableau de traduction ou du tableau des participants, vous gagnerez un temps considérable en créant votre propre standard plutôt qu’en vous débrouillant avec les formats divers et variés qui vous seront envoyés.
- Optez pour une traduction modulaire : vous avez un long texte à faire traduire ? Faites-le traduire paragraphe par paragraphe ! Comme ça, vous n’aurez pas besoin de revoir toute la traduction si un paragraphe change !
- Responsabilisez vos interlocuteurs. Plutôt que de faire des changements vous-même à partir des retours des relecteurs, proposez-leur de faire eux-mêmes leurs corrections sur le tableau de traduction !
- N’hésitez pas à user et abuser d’Excel. Export des textes à traduire depuis l’outil d’enquête en ligne, modèle de tableau de traduction, formules pour concaténer des phrases ou mettre en forme un paragraphe, tableau pour repérer les adresses e-mails manquantes, formules pour supprimer les espaces des adresses e-mail, tableau croisé dynamique pour repérer les doublons, requêtes pour réorganiser les colonnes sans toucher au tableau d’origine… De nombreux outils pourront vous aider à automatiser en grande partie certaines tâches fastidieuses et copier-coller.
Penser process et standardisation, c’est faciliter votre vie, celle des traducteurs et relecteurs, et limiter le risque d’erreurs. Alors pas question de se priver !
9. Animer les équipes locales
Qu’il s’agisse de traduire, de relire, de transmettre les contacts ou de leur attribuer des langues préférées, j’ai beaucoup parlé des “équipes locales”. Beaucoup d’enquêtes multilingues sont en effet menées auprès des employés ou clients d’une entreprise dans un ou plusieurs pays. Et cette entreprise dispose généralement de responsables de ces pays et/ou parlant les langues en question.
A partir du moment où les personnes en charge du projet ne parlent pas toutes les langues concernées, l’implication des équipes locales est quasi indispensable. En plus d’aider à assurer une bonne traduction, celles-ci peuvent notamment se faire les relais du projet, et booster ainsi la participation à l’enquête. Elles peuvent également vous aider à mieux identifier et traiter certaines spécificités culturelles que vous n’auriez pas pu anticiper.
Pour engager ces équipes locales dans le projet, n’oubliez pas :
- D’anticiper, en les informants longtemps à l’avance
- De les informer de l’avancement du projet en général, et pas uniquement quand vous avez besoin d’elles
- De les associer à la réussite du projet, en partageant bien les enjeux et la réussite du projet avec elles
- D’assurer une gestion de projet exemplaire : tâches précises, délais clairs et raisonnables, communication efficace, pas de réunions inutiles…
- De leur partager les résultats de l’enquête : à la fois les résultats globaux et pour leur périmètre, idéalement.
10. Comprendre comment marche un traducteur automatique de page web (pour résoudre certaines erreurs mystérieuses)
Vous vous demandez peut-être ce que ce point fait là. Il s’agit en fait de bien comprendre la source d’une erreur fréquente (et au premier abord mystérieuse) qui a fait s’arracher leurs cheveux à un paquet de sondeurs.
Concrètement, certains relecteurs ou participants vous remonteront une erreur dans le texte : un mot étrange, une phrase qui n’est pas à sa place, une phrase traduite alors qu’on voulait la laisser dans la langue originale, ou vice-versa. Et vous aurez beau chercher, vous ne trouverez pas d’où vient l’erreur. Vous pourrez vérifier 1000 fois d’un côté ou de l’autre, la plateforme n’affichera pas la même chose chez vous et chez eux… Comment c’est possible ?
C’est tout simplement que l’erreur ne vient ni de vous ni de la plateforme, mais directement de l’appareil de la personne qui consulte l’enquête. Certaines personnes activent en effet en permanence, sur leur navigateur web, une extension de traduction automatique. Cette extension recherche tout texte “étranger” sur une page web, et le traduit. Sauf que ces extensions font parfois du zèle, et traduisent du texte que l’on n’avait du tout envie de traduire ! (ce n’est d’ailleurs pas toujours une “traduction” à proprement parler, mais simplement un mot remplacé par un autre)
Cette traduction est effectuée directement depuis le navigateur de l’utilisateur, donc il n’y a rien que vous puissiez “corriger” à votre niveau. Le mieux à faire est d’expliquer à l’utilisateur la source du problème, et de l’inviter à désactiver les éventuelles extensions de traduction ou de correction automatiques qui seraient activées sur son navigateur. S’il ne sait pas comment faire, invitez-le simplement à changer de navigateur ou d’appareil, et le problème devrait se régler de lui-même.
Et si vous souhaitez anticiper ce souci, vous pouvez toujours recommander dans le mot d’introduction de désactiver toute extension de traduction automatique !
Conclusion : pour réussir votre enquête multilingue
Si une enquête bilingue courte peut se gérer assez facilement (surtout si vous parlez les deux langues en question), la complexité augmente rapidement avec le nombre de langues et de questions. Ne sous-estimez donc pas la complexité d’une enquête multilingue, et organisez-vous en conséquence ! Et si vous avez l’impression que certains de mes conseils sont superflus… Je vous recommande de les appliquer quand même. On ne sait jamais, cela pourrait vous éviter de nombreux allers-retours et erreurs, et des dizaines d’heures de travail inutile…
Et si vous souhaitez être accompagné par un professionnel dans votre projet, je suis à votre disposition !
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Photo by Hannah Wright on Unsplash
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